“Fall in your ways, so you can crumble.
Fall in your ways, so you can wake up rise”.
« Acceptes ce que tu es pour aller de l’avant
Acceptes tes faiblesses pour aller de l’avant »
C’est ainsi que la talentueuse Solange Knowles débute son album « A seat at the table », sur un morceau qui s’intitule Rise. S’élever, grandir, se lever. C’est le voyage que nous propose Solange avec ce tout nouvel album. Une véritable introspection que Solange nous invite à faire en musique et en image. Des rythmes groovy sur des mélodies mélancoliques, tout cela toujours saupoudrée d’une voix douce et aigue qui vient vous chuchoter voir murmurer ses messages à l’oreille. Un album plein de poésie tant les métaphores sont belles et les images puissantes.
Mais ce qui m’a le plus plu avec cet album, ce sont les questions qu’il a soulevé chez moi. J’adorais l’album, j’en étais sûrement à ma cinquantième écoute mais je lui reprochais une chose: son titre. En fait, ce qui me dérangeait ce n’était pas le fait que l’album s’intitule ainsi, le titre semblait évident à la fin de chaque écoute. Je reprochais à SOLANGE KNOWLES d’avoir appeler son album ainsi. Vous me direz sûrement « Qui suis-je pour reprocher quoique ce soit à SOLANGE? ». Et je vous l’accorde, mais je trouve honnête de vous faire part d’un de mes grands moments d’égarement qui au final m’a surtout permis de faire le point sur mes propres préjugés.
J’ai eu une longue conversation à ce sujet avec mon copain. J’essayais par A+B de lui expliquer que je trouvais l’album génial mais que ce titre d’album me posait un véritable problème car à mes yeux, Solange, sûrement de par son affiliation avec Beyoncé, ne faisait pas partie des jeunes femmes noires en manque de privilèges. Selon moi, à ce moment précis de notre conversation, je ne la trouvais pas légitime au vu de sa position dans la société. Etant une jeune femme aisée, ayant la chance de vivre de sa/ses passion(s), de voyager dans le monde entier et puis surtout étant la sœur de Beyoncé.
Bref, vous l’aurez compris avec un peu de recul je me rends compte de l’énormité de mon propos. Ce qui est assez fou dans cette histoire, c’est que ce soit mon copain qui m’ait donné une leçon de féminisme ou plutôt d’afro-féminisme afin de me remettre les idées en place. Comme quoi, on n’est jamais l’abri des préjugés…
Cependant, j’ai trouvé la conversation que nous avons eue très intéressante car elle a permis de me rappeler certaines choses qui visiblement n’étaient pas complètement acquises.
- L’argent n’efface ni la couleur, ni le sexe !
Un des reproches que je faisais à Solange était de se revendiquer si fortement ou si puissamment afro-féministe avec ce nouvel album alors que sa condition sociale actuelle lui offre un certain nombre de privilèges que beaucoup de femmes noires américaines, ou non, ne connaîtront sûrement jamais. Pourquoi demande t-elle « une place à table » ? Elle en a déjà une qui est loin d’être inconfortable. Mais là se trouvait ma première erreur. Grave erreur même, sachant que je venais de terminer le livre de Bell Hooks « Ne suis-je pas une femme ? » qui réexplique le terme d’intersectionnalité popularisé par Kimberley Crenshaw. A savoir qu’en tant que femmes noires, les femmes font faces à des luttes multiples : racisme, sexisme, lutte des classes. Ce qui signifie que bien que Solange ait gravit les échelons d’une société dite capitaliste, cette même société n’est en rien moins racistes, ni sexistes. J’aurais d’ailleurs du me rappeler à ce moment même de son texte « And do you belong ? I do » sorti début septembre qui raconte une de ses expériences de racismes ordinaires. En effet, le compte en banque de Solange ne l’a rend ni « moins noires » ni « moins femmes ». My bad Solange !
- Nous avons toutes le droit à la parole !
Le deuxième reproche que je faisais à Solange au final était d’une certaine manière de prendre la parole. Ou du moins je lui reprochais le succès de son album en me disant qu’une jeune femme tout aussi talentueuse qu’elle, mais n’ayant pas les mêmes moyens n’auraient sûrement pas eu le même succès. Et c’est sûrement vrai, cependant, la notoriété de Solange, permet à des millions de jeunes femmes et d’hommes de se sentir concernés par les problématiques qui touchent les noires aujourd’hui. Son succès en inspire sûrement plus d’une et c’est ce qui compte.
Il y avait peut être un brin de jalousie dans mes propos. J’aurais sûrement aimé être à l’origine d’un tel album. Mais bon vu mon talent de chanteuse, les choses auraient été assez difficiles.
Tout cela pour dire si Solange a la parole, vous aussi vous avez droit à la parole. Nous avons droit à la parole. Nous avons le droit de nous raconter, de parler de nos problématiques, de les faire connaître au monde. Mais nous avons surtout le droit de nous inspirer mutuellement quelque soit notre classe sociale, quelque soit nos orientations sexuelles, quelque soit nos différences.
J’espère donc que Solange ne m’en voudra pas pour ce petit moment d’égarement. J’en suis sûrement à la 10 ème écoute de la journée de l’album au moment où j’écris ces quelques lignes.
« Walk in your ways, so you won’t crumble
Walk in your ways, so you will wake up and rise ».