Kimberley Demagny (Entrepreneure) – “Pourquoi pas venir dans les Caraïbes pour découvrir de l’art…”

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Notre QUEENSPIRATION s’appelle Kimberley Demagny et elle a décidé de tendre le micro aux artistes, aux artistes de la Caraïbe plus précisemment, avec son projet Caribeart. Une entrepreneure de l’âme installée depuis plusieurs mois en Guadeloupe et bien décidée à vivre de ses passions.

RTM | Bonjour Kimberley, nous sommes ravies de t’accueillir sur RTM. Pour commencer, peux-tu te présenter à nos lectrices et lecteurs ?

Kimberley | Bonjour, je m’appelle Kimberley Demagny. J’ai 24 ans. Je suis consultante en marketing digital, spécialisée dans la culture, le bien-être et le tourisme.

Je suis également la fondatrice de Caribeart, un magazine en ligne 100% digital, qui met en avant l’art caribéen et fait la promotion des artistes dans la Caraïbe. Un magazine en français et en anglais. 

RTM | J’ai découvert Caribeart sur Instagram alors que je cherchais des inspirations d’art caribéen. Je suis tombée amoureuse du contenu que vous proposez. Peux-tu nous raconter la genèse de ce bébé ?

Kimberley | J’ai toujours aimé l’art. J’ai fait un bac design et art appliqué avant de m’orienter finalement vers la communication et la publicité. Il y a un an, j’ai senti le manque de cette partie artistique alors que je travaillais encore pour une agence de communication digitale. Je ne me sentais pas en adéquation avec les missions que j’effectuais pour des grands groupes, orientés commerce.

Je me suis interrogée sur ce que j’aimais : l’art et la communication. Etant très chauvine, très fière d’être guadeloupéenne et caribéenne, je me suis dit qu’il serait intéressant de promouvoir ma Caraïbe via l’art. La naissance de Caribeart, c’est un doux mélange entre ma passion et mes compétences professionnelles.

J’ai voulu faire la promotion de ces artistes, jeunes ou moins jeunes, amateurs ou professionnels, connus ou inconnus, qui font rayonner l’art caribéen mais qui manque souvent de plateformes pour être mis en avant.

RTM | Selon toi les artistes caribéens ont-ils du mal rayonner à l’international ?

Kimberley | Non. Je pense que l’art caribéen rayonne. Seulement, les places sont chères, et seuls ceux qui ont une réelle exposition parviennent à dépasser leurs frontières. On ne part pas de rien. Cependant les artistes émergents ont eu du mal à aller au-delà de leurs îles. C’est ce qui m’a motivé à créer Caribeart.

La plateforme a pour vocation de briser les barrières pour les artistes émergents et confirmés, et également de faire tomber les barrières de langue. C’est un facteur qui limite les échanges entre nos îles. C’est pour cela que la plateforme est en français et en anglais, et sera bientôt traduite également en espagnol.

“Je considère qu’être femme et artiste, c’est un peu une évidence.”

RTM | Vois-tu une différence entre les artistes anglophones et francophones au niveau de la Caraïbe ?

Kimberley | Je pense que les francophones ont certains avantages, car un peu plus de moyens. Il y a de véritables disparités entre les îles. Sur certaines îles, les artistes n’ont même pas de smartphones sur lesquels les joindre. J’ai notamment rencontré ce cas avec des artistes de Sainte-Lucie, St. Kitts ou Montserrat. D’autres îles anglophones ont plus de moyens, tels que Trinidad ou la Barbade. Avec Caribeart, je souhaite mettre tous les artistes caribéens au même niveau.

RTM | Si tu devais nous citer un artiste découvert récemment qu’il faut absolument découvrir ?

Kimberley | C’est une question difficile, je découvre des artistes, des pépites tous les jours. Ce que j’aime avec Caribeart, c’est que justement, quel que soit ses goûts, on y trouvera toujours un artiste qui nous fera vibrer.

RTM | Parlons de la place des femmes dans l’art, et notamment de la place des femmes caribéennes dans l’art. Comment sont-elles représentées ?

Kimberley | C’est compliqué. Dans mes recherches, je me rends compte qu’il est difficile pour moi parfois de trouver des femmes artistes. Je ne sais pas si c’est parce qu’il en manque ou parce qu’elles manquent de visibilité…

Une fois que mon média gagnera un peu plus en maturité, je souhaiterais consacrer une série dédiée aux femmes artistes.

Je considère qu’être femme et artiste, c’est un peu une évidence. C’est tellement logique. J’ai envie d’avoir ces conversations avec ces femmes caribéennes. Et pourquoi pas trouver le fil conducteur qui leur permettra de rayonner.

RTM | Quels sont les projets de Caribeart pour 2020 ?

Kimberley | Je souhaiterais développer le tourisme par l’art et ainsi développer un agenda. On va bien à Paris pour aller au Louvres ou aux Etats-Unis pour visiter le MET. Alors pourquoi pas venir dans les Caraïbes pour découvrir de l’art.

J’ai déjà référencer près de 400 musées, galeries et ateliers d’artistes. Ce qui me permettra de faire la promotion des vernissages, ou autres expositions. Je rêve de parcours entre les îles pour y découvrir la facette artistique de chacune, ou encore de croisières orientées art.

Outre l’agenda, je vais augmenter le rythme de mes vidéos. Je vais passer à une vidéo par mois. Je vais également intégrer une personne dans mon équipe qui va gérer les demandes entrantes que nous avons sur les îles anglophones.

Caribeart, c’est une passion qui ne me rapporte rien pour le moment, mais grâce à laquelle je gagne énormément sur le plan humain. C’est un projet qui me nourrit de par les rencontres, les échanges, la création.

RTM | Tu parlais justement de ton côté chauvin. Qu’est-ce qui t’a motivé à rentrer t’installer en Guadeloupe ?

Kimberley | Au départ, je suis rentrée pour des raisons familiales. Il y a un an et demi, je vivais à Bordeaux, je travaillais pour le Château de la Perrière. J’avais une bonne situation. Puis mon père a eu des soucis de santé.

Je n’avais pas envie d’être loin. Je n’avais pas envie qu’il puisse se passer quelque chose et que je sois loin. J’avais envie de pouvoir profiter de mes parents. Ce n’était pas un choix facile mais c’est ce qui m’a poussé à rentrer à ce moment-là.

Le retour n’a pas été simple. En tant que jeune, on pense que la Guadeloupe nous attend à bras ouvert. Généralement on se prend une jolie claque. Au début j’ai un peu stagné. J’ai mal vécu le retour. Puis j’ai décidé que ça allait être du temps pour moi. Je me suis tournée vers le développement personnel, j’ai pris le temps qu’il fallait puis j’ai eu cette opportunité en agence qui m’a permis de débloquer les choses.

RTM | Comme tu nous le disais au début, tu as une double casquette. Tu travailles également dans le domaine du marketing digital. Comment choisis-tu tes projets ?

Kimberley | C’est exact. Je suis aussi consultante en marketing digital.

Aujourd’hui, je suis arrivée à un stade où je peux pratiquement travailler uniquement sur des projets que j’aime.

J’avais vu passer ton post sur l’éthique et c’est quelque chose qui me posait problème au début, parce que j’avais des demandes qui n’étaient pas éthiques. Sauf qu’au début, tu te dis, c’est de l’argent, j’ai besoin de vivre… puis rapidement je me disais que j’allais inconsciemment autosaboter ces projets n’étaient pas en accord avec moi.

Les débuts ont été très difficiles, surtout financièrement. Maintenant je gagne bien ma vie et je fais ce que j’aime.

Je choisis des projets qui me parlent, qui me plaisent et qui me permettent de m’investir à 100%. Je m’éclate en travaillant.

RTM | Ca ne doit pas être évident de jongler d’un projet à un autre. Comment gères-tu ? 

Kimberley | En faisant mon bilan de fin d’année 2019, je me suis rendue compte que ce qui a été le plus difficile, c’était de réussir à imposer aux personnes avec qui je travaillais, du respect pour mon temps et pour mon énergie. Tu sais cette pression que tu peux ressentir quand un client veut une réponse instantanée à son email ou à son message alors que tu as 1000 autres choses à gérer en priorité. 

J’ai dû prendre le temps d’expliquer. Ca a été houleux, mais j’ai dû instaurer des règles, expliquer ma manière de travailler. Ca n’a pas été choses faciles d’imposer cela, mais c’était essentiel selon moi. C’était une façon de me faire respecter et de faire respecter mon travail. A certaines périodes, je me suis vraiment sentie débordée, à la limite du burn out.

Aujourd’hui, mes clients ont beaucoup de respect pour mon temps et mon travail. Quand je ne réponds pas au bout de 3 jours, ils ne m’harcèlent pas.

Je fais toujours les choses dans les délais. Me mettre la pression ne sera en rien productif, donc je gère comme ça. Et puis j’ai des petits logiciels d’entrepreneurs qui me facilitent également la vie.

RTM | En parlant de bien être, comment préserves-tu le tien ?

Kimberley | Je pense qu’il ne faut pas se mettre de pression. J’avais lu que certaines personnes faisaient des burn out en faisant du yoga parce qu’elles se mettaient trop de pression en voulant manger équilibré, faire du sport, être de bonne humeur, boire de l’eau, penser positivement etc…

Mon travail, cette année, a été de lâcher prise, de ne pas vouloir tout contrôler. J’apprends à m’imposer des week-ends de repos et à accepter de fermer mon ordinateur le soir. Au début j’avais des crises d’angoisses lorsque je ne travaillais pas. C’était difficile de laisser des messages ou des emails sans retour. J’ai appris à m’éduquer. J’ai appris qu’il fallait que je respecte cette bulle de bien-être.

Pour rebondir sur le bien-être, je m’apprête d’ailleurs à lancer ma deuxième société mi 2020 avec Mahité Perrault, appelé « Serenity Islands ». Une société destinée à promouvoir des séjours bien-être dans les îles du monde entier. Ce projet, c’est la continuité du travail que je fais sur un plan personnel. Quand tu es cheffe d’entreprise, ce n’est pas simple de s’accorder du temps pour soi, mais c’est tellement important. C’est important de recharger ses batteries, un peu comme quand on recharge son téléphone. Il faut laisser la batterie aller à 100% pour qu’elle ne perde pas en énergie.

L’important ce n’est pas tant de travailler beaucoup, mais surtout de travailler bien. Il faut apprendre à ne pas s’épuiser.

“Je souhaiterais développer le tourisme par l’art”

RTM | Quels conseils donnerais-tu à une jeune femme guadeloupéenne qui rentre s’installer sur son île et qui voudrait se lancer dans un projet entrepreneurial ?

Kimberley | Je lui dirai que le plus dur c’est de sauter. Une fois en l’air, on s’éclate. Peu importe son âge, peu importe qu’on ait une expérience ou non dans le domaine. Je considère que l’on a une mission de vie, un parcours qui nous est propre. Ne pas se mentir à soi-même, c’est ce qui est important.

Je ne dis pas que c’est facile, évidemment que l’on prend des claques et que l’on rencontre des difficultés. Par exemple, je n’ai pas gagné d’argent pendant 8 mois. Mais je savais que j’étais alignée avec mon moi. Et aujourd’hui ça paye.

Je lui dirai, si tu as envie de faire, fait, parce que si tu n’essayes pas, tu auras des regrets. Au pire des cas, tu réussis !

RTM | Si tu devais nous citer 3 femmes qui t’ont inspiré ?

Kimberley | Il y en a beaucoup.

 J’adore Viola Davis. Quand je la regarde, j’ai l’impression de me nourrir de son énergie, elle est tellement puissante. Elle est tellement belle que je me dis wouaw.

Ensuite il y a Tina Kunakey, qui m’a aidé à assumer le volume de mes cheveux. C’est con. Mais en fait avant je m’attachais tout le temps les cheveux. Je n’appréciais pas le volume. Quand j’ai vu cette femme et son volume, j’ai voulu m’autoriser à accepter ma chevelure et mon volume. Je me souviens, à cette période, être tombée sur une photo de moi à 3 ans avec mon afro bouclé, et me dire « mais c’est moi ça ». Je suis donc redevenue moi avec un coup de pouce de cette femme.

Et enfin, je dirai ma mère, parce que c’est une femme qui se bat beaucoup, qui est à la fois maman et papa même si j’ai mon papa. C’est vraiment la femme poto mitan malgré elle, finalement. Une maman on l’appelle à la rescousse. C’est toujours elle qui me rattrape. C’est mon pilier.

RTM | Qu’est-ce qui fait de Kimberley une Reine Des Temps Modernes  ?

Kimberley | J’aide d’autres reines à être des reines en les accompagnant dans leurs projets et dans leurs communications. Par exemple, quand j’ai eu Christelle de Roots Edition, qui est venu me voir en me disant qu’elle allait faire venir en Guadeloupe Ilyasah Shabaz, la fille de Malcom X. Tout le monde lui riait au nez, parce que soit disant elle n’était personne, j’ai dit « ah bon et ben on va leur montrer ! ». C’est ce que j’aime. C’est de la sororité. J’aime le fait de rencontrer des femmes, de les accompagner et de les aider. C’est ce qui fait de moi une Reine, le fait de rendre d’autres femmes Reines !

2 Commentaires

  1. Toutes mes félicitations pour ce parcours courageux qui grâce à l’éthique sous-jacente de votre esprit permettra à la jeunesse d’ avancer pour elle même mais aussi pour une société plus juste et équilibrée.
    Retraité de 75 ans en Guadeloupe depuis 15 années , je partage avec vous cette inspiration que donne notre belle Guadeloupe aux artistes qui recherchent simplement ce qui est beau et donc bon pour l’ esprit . L’ Art pour l ‘ Art véritable est aussi l’ Art pour la vie .
    L’ Art comme la littérature, doivent affronter les maux et les difficultés de la vie sans désespoir de la capacité humaine à triompher des épreuves. La bataille de la vie doit se gagner même si nous n’ avons aucune garantie d’ y parvenir.

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