Vous à apprendre à “Gérer votre budget avec un minimum d’effort” telle est la mission que s’est donnée notre QUEENSPIRATION de la semaine. Elle s’appelle Maeva, elle est la fondatrice de “Mon Budget Bento”, une plateforme qui permet de se familiariser avec les finances de manière simple, relax et décomplexée.
RTM | Bonjour Maeva, pour commencer, quels sont les 3 mots que tu choisirais pour te définir ?
Maeva | Le premier mot qui me vient à l’esprit, c’est flemmarde. Je suis très flemmarde. On ne pense pas, mais la flemmardise a un avantage, c’est qu’elle t’oblige à être efficace. Ensuite je dirai têtue. Et enfin, marrante (sourire).
RTM | Avant de parler de ton projet, peux-tu revenir sur ton parcours ?
Maeva | Je suis née à Paris, dans le 18ème. J’ai grandi en banlieue parisienne. J’ai fait ma scolarité dans le 95 à côté d’Argenteuil. Après mon bac, j’ai commencé par des études de communication dans le 93. J’ai enchainé avec une école de commerce à Paris où j’ai obtenu un bachelor. Au bout de ces 2 années, j’ai fait une pause d’un an car étant enceinte de mon fils. J’ai repris après sa naissance. J’ai obtenu un master dans la même école de commerce. Puis j’ai intégré l’entreprise dans laquelle je suis encore aujourd’hui. Cela fait 10 ans maintenant que je suis dans cette entreprise. Je suis passée par 4 ou 5 postes différents. J’y suis rentrée en CDD. J’ai fait du marketing, puis de la vente avant de passer commerciale grand compte.
RTM | 10 ans dans la même boite, ça semble ne pas être commode.
Maeva | J’avais ma petite idée en tête en arrivant dans cette boite. Dès le départ, ce qui m’intéressait c’était le poste de commercial grand compte. Je suis pourtant arrivée par la voie du marketing. J’avais 25 ans, il fallait d’abord que je fasse mes preuves. Mais avec le temps, l’opportunité s’est présentée à moi.
RTM | Quel était ton rapport à l’argent à cette époque ?
Maeva | Il faut quand même que je précise que j’ai fait mon master en apprentissage. J’ai donc commencé à gagner de l’argent pendant mes études. A l’époque je devais gagner 1000 euros. Quand une de mes amies, qui était acheteuse me disait qu’elle gagnait 35K, je considérais que c’était énorme. Ensuite, quand je suis rentrée dans ma boite et que j’ai découvert les salaires de certains commerciaux, j’ai compris qu’il était possible de gagner beaucoup d’argent. Je pensais naïvement que les salaires à 6 chiffres étaient réservés à certains types de profession, notamment les pilotes d’avion. Avec le temps j’ai compris que « beaucoup d’argent » est une notion qui est fonction de l’environnement dans lequel tu évolues.
RTM| Savoir que ces salaires existent c’est une chose. S’autoriser à les demander, à les réclamer, à les négocier, c’en est une autre.
Maeva | Je suis quelqu’un de très simple. Si on veut vraiment quelque chose il faut le demander. Si ta priorité, c’est d’être gentille ou que l’on pense du bien de toi évidement que c’est difficile. Personnellement je prends cela comme un jeu. Je n’hésite pas à demander. Si on me donne tant mieux, si on ne me donne pas tant pis. Parfois je me demande si je suis câblée comme tout le monde, parce que certaines choses me paraissent tellement évidentes.
Je ne sais pas si cela vient du fait que j’ai perdu ma mère très tôt, à 7 ans. J’ai grandi en étant très détachée des sentiments des autres. Il y a beaucoup de choses qui ne me touchent pas, beaucoup de choses que je considère comme n’étant pas graves. Parfois je dis que je suis un peu un robot.
Résultat, me mettre en face de quelqu’un et lui demander une augmentation, ça ne me dérange pas. Je vois à travers les réactions sur ma page que certaines femmes ont peur de ce que l’on va pouvoir penser d’elle. Certaines se posent beaucoup de questions. Je pense qu’il faut garder en tête qu’à la fin de la journée, la personne à qui vous allez demander quelque chose, elle ne pensera même pas à vous.
RTM | Quels conseils donnerais-tu pour demander une augmentation ?
Maeva | La première chose à garder en tête, c’est j’essaye toujours de donner mon maximum au travail. Je ne sais pas si j’ai des capacités ou des facilités mais je tiens à toujours fournir un travail de qualité. Je suis également très curieuse. Je n’ai pas peur de me dépasser sur certaines missions.
Certaines personnes veulent l’augmentation mais pas la charge de travail qui va avec l’augmentation.
J’ai également la chance d’être dans une boite qui rémunère bien ses employés. Ce n’est pas une entreprise connue, et je trouve que parfois les entreprises moins connues payent mieux. Les entreprises de renom jouent sur leur notoriété. C’est donc tout un contexte également qui m’a permis d’être à l’aise à ce niveau. Cela dit, certaines personnes dans ma boite sont au même poste depuis longtemps et n’ont pas nécessairement évolué en termes de salaires. Ça montre bien les différences qui peuvent exister.
“Si elles pensent que l’argent n’est pas fait pour elles, what can I say ?”
RTM | A quel moment te dis-tu, mon taff n’est pas assez prenant, je vais me rajouter une charge de travail en créant une page Instagram et en écrivant un livre « Mon budget sur pilote automatique » ?
Maeva | J’avais déjà cette idée dans un coin de ma tête. Et le covid est venu accélérer les choses. Le fait d’être chez soi, seule, tout le temps. Il y a eu un énorme coup de frein au niveau de l’activité professionnelle. J’avais du temps pour faire autre chose.
RTM | Quelles étaient tes motivations de départ ?
Maeva | Il y a deux évènements qui se sont croisés. D’un côté, il y avait mon frère qui vivait avec moi à l’époque. On avait régulièrement des débats sur la politique, le social. Et je lui disais régulièrement que nous avions également un devoir de nous bouger pour faire avancer les choses. Il me répondait régulièrement que c’était simple pour moi parce que j’avais des facilités à gérer mon argent et que ce n’était pas le cas de tout le monde. Il m’a donc conseillé d’écrire un livre pour partager justement mes bonnes pratiques. L’idée a fait son bout de chemin.
En 2017, j’ai eu l’idée de créer un réseau professionnel de femmes noires. L’idée à terme était de pouvoir créer un groupe d’investissement qui permettrait d’investir dans des projets immobiliers à plusieurs. Ce qui permettrait de ne pas placer tous ses œufs dans le même panier et de diversifier ses investissements. J’avais envie de le faire avec des femmes noires.
Je me rendais compte de la manière dont j’étais traitée par les banques alors que j’avais une situation plus que confortable. Je pensais à toutes celles pour qui ce n’était pas le cas et que les banquiers prenaient plaisir à prendre de haut.
Ce sont toutes ces raisons qui m’ont motivée à écrire un livre et à lancer ma page Instagram.
RTM | C’est une chose de gagner de l’argent. Mettre de l’argent de côté et investir en est une autre. Certaines personnes gagnent de l’argent sans jamais l’investir. Qu’est-ce qui t’a donné envie d’investir ?
Maeva |J’ai eu mon fils à 22 ans, donc relativement tôt. Ça a vite coupé court à ma vie sociale. Je ne pouvais pas m’amuser à sortir tous les week-ends. Je n’avais ni ma mère, ni ma belle-mère qui vivait loin. Je n’avais pas de relais. Ne pas avoir de vie sociale ça aide à faire des économies.
Il faut aussi dire que j’épargne depuis que j’ai 15 ans. J’ai toujours épargné. Même quand j’avais des petits boulots et que je bossais sur les marchés, je mettais de l’argent de côté.
Mais épargner pour épargner ça n’a aucun sens au bout d’un moment il faut se lancer et penser à l’investissement, à faire fructifier cette épargne.
RTM | Si tu devais nous résumer ce qu’est le projet « Mon budget bento », que nous dirais-tu ?
Maeva | Il s’agit d’une plateforme qui permet de se familiariser avec les finances, la gestion de budget et la finance en général de manière simple, relax et décomplexée. La finance c’est souvent chiant. J’essaye d’y mettre un peu d’humour, et de le rendre accessible au plus grand nombre. Instagram se prête bien à l’exercice.
RTM | Qu’est-ce que ce projet t’a appris sur toi-même ?
Maeva | Qu’il fallait que j’arrête de me lancer dans des projets en me disant que ça va être « petit ». Au départ je pensais imprimer 30 livres. J’en suis à plus de 2000 ventes. Il y avait une petite marge d’erreur. J’ai compris également qu’avec des choses simples, il est possible d’impacter la vie des autres. J’ai beaucoup de retours de personnes qui me disent que grâce au projet, ils ont repris leurs finances en main, qu’elles ne sont plus à découvert constamment. Je trouve ça génial.
RTM | Quelles sont les difficultés que tu as pu rencontrer en tant que femme noire voulant investir ?
Maeva | Je voulais créer une SCI avec une personne morale et une personne physique pour un de mes projets. Il s’agissait d’un paramétrage assez spécifique. Les banques généralement ne financent pas ce type de projet. Au lieu de passer par un courtier, j’ai décidé d’être mon propre courtier et d’aller moi-même voir les banques. Ça m’a permis de voir l’envers du décor et surtout de me retrouver dans des situations très désagréables. Heureusement ça n’est arrivé qu’une fois.
RTM | Quels conseils donnerais-tu aux femmes qui pensent que les investissements immobiliers ne sont pas faits pour elles ?
Maeva | Si elles pensent que l’argent n’est pas fait pour elles, what can I say ? (rires). C’est mon côté un peu cynique. J’ai peur également avant de faire un investissement, mais si je ne le fais pas qui le fera pour moi ? Personne. Donc, je prends ma peur dans mon ventre et je la serre fort. Il faut également se rappeler qu’on n’est pas obligée de tout faire seule. On peut également se faire accompagner.
Personnellement, j’aime bien me débrouiller toute seule, maîtriser de A à Z. Ce n’est pas toujours la meilleure solution, car on commet forcément des erreurs. Mais ça ne me dérange pas. Je ne suis pas perfectionniste. Et comme je te le disais au départ, je suis une flemmarde.
Il faut aussi prendre des risques en fonction de sa capacité financière. C’est la raison pour laquelle je mets souvent l’accent sur l’épargne. Sans épargne, c’est normal d’avoir peur. Si quelque chose ne se passe pas comme prévu tout est remis en cause.
RTM | Qu’est-ce qu’une bonne épargne ?
Maeva | Elle doit être calibrée en fonction de tes projets. Si tu décides d’acheter un bien pour lequel il faudra effectuer des travaux, il y aura certainement des frais à avancer, des imprévus à gérer. Il faudra avoir la capacité d’avancer ces frais.
Sans avoir de projet immobilier, le minimum du minimum c’est d’avoir 1000€ de côté. Si tu n’as pas 1000€ de côté, tu n’as pas d’épargne. Ensuite l’objectif c’est d’avoir l’équivalent d’au moins deux mois de charge pour assurer les imprévus de tous les jours.
Il faut se demander pourquoi on souhaite investir. Est-ce que tu veux te lancer dans l’immobilier parce que tu as vu 15 posts sur Instagram ? Ou est-ce que tu as une stratégie ? Par exemple, j’ai décidé d’investir dans l’immobilier pour assurer ma retraite. Si tout se passe comme prévu et que je suis encore en vie à 50 ans, je n’aurais plus besoin de travailler.
Ça demande des sacrifices (des efforts, du stress, du temps) que tout le monde n’a pas nécessairement envie de faire.
RTM | Comment t’es-tu formée sur le sujet ?
Maeva | Tout ce que j’ai fait, je l’ai fait toute seule. Je ne me suis jamais faite accompagner.
Quand tu dois rester chez toi avec ton enfant qui dort à certains moments, ça laisse du temps pour faire autre chose. Chacun choisit ce qu’il fait de son temps libre. Par exemple, je ne regarde pas de séries. Quand j’entends certaines personnes parler de 120 épisodes d’une série qu’ils ont pu regarder, c’est du temps qui peut être utiliser pour autre chose. Je ne dis pas ça pour dénigrer ou autre. Ce n’est simplement pas mon centre d’intérêt.
RTM | Quelles réactions reçois-tu de ta communauté vis-à-vis de ton contenu ?
Maeva | Certains lecteurs m’ont écrit en me disant qu’ils étaient obligés de faire des pauses car cela procurait chez eux un trop plein d’émotions. Généralement il y a deux réactions, ceux qui ne se sentent pas concernés, et ceux qui au départ ont l’impression que j’exagère, que je serais moralisatrice.
Certain.es prennent les choses de manière personnelle. Alors que je ne les connais pas donc je ne peux pas écrire en pensant à eux. Avec un peu de recul, ils digèrent et réalisent que leur comportement ne nuit qu’à eux-mêmes.
Il y a souvent des réactions épidermiques. Ce n’est jamais agréable. On peut avoir des débats, je veux bien débattre des idées mais je ne débats pas sur les chiffres. Quand tu es à découvert à la fin du mois, tu ne peux pas me dire que tu gères bien. Ce n’est pas compatible. J’ai vécu avec très peu d’argent. Je sais que c’est possible. Mais souvent, c’est un problème d’égo. Une fois que tu as réglé ton problème d’ego, la vie est plus belle et plus simple.
RTM | Où te-vois-tu dans 10 ans ?
Maeva | Je ne pense pas rester salariée pendant encore 10 ans. La prochaine étape si je continue c’est de devenir manager, et je n’ai aucune envie de devenir manager. Dans 10 ans, je ne veux plus être dans l’obligation de travailler. Dans 10 ans, je veux être sereine. Ce que je recherche ce n’est pas tant la liberté financière, que la liberté de pouvoir expérimenter jour après jour sans me poser trop de questions.
J’aurais ma boite, je serai millionnaire. J’aurais ma maison, je serai contente de faire le job que je fais.
RTM | Quels sont tes hobbies, tes passe-temps ?
Maeva | Je n’ai pas de hobbies (rire). Avant j’aimais bien courir. Ça fait du bien au corps et à la tête. J’ai arrêté entre temps. J’aime bien peindre. Ça me détend. J’adore danser la salsa mais en ce moment avec le covid, ce n’est pas très propice.
RTM | Qu’est-ce qui fait de Maeva une Reine des Temps Modernes ?
Maeva | Je n’aime pas le papier (sourire). J’aime bien les nouveaux outils de productivité. Je travaille dans une boîte de la Tech. Ce n’est pas trop mal ce que j’ai réussi à faire avec mon compte. Je suis à un stade où je suis contente de ce que je fais. Je m’en sors bien financièrement.