Colorisme.
J’aimerais parler de Colorisme, sans pour autant ressasser ce que bon nombre de Dark skin people dénonce à juste titre – manque de reconnaissance et de visibilité notamment dans les médias traditionnels. Aujourd’hui, j’aimerais plutôt dénoncer la normalisation du Colorismedans nos sociétés modernes, c’est-à-dire le fait qu’il apparaisse comme « normal » que les Dark skin people aient moins d’opportunité, attractivité sur le plan social, économique & sentimental.
Ce Billet sera limité à mon expérience d’Afro-Caribéenne, en exode en France métropolitaine
Définition. Le Colorisme avec mes mots, du moins ce que j’en ressens
Contrairement au racisme, qui classifie les « races » (soyons mesurés, il n’existe que la race humaine) selon un rapport hiérarchique bien connu #Whitesupremacy; le Colorisme établit au sein d’une même communauté, ethnie une hiérarchie fondée sur les déclinaisons d’une couleur de peau ; cela se traduit chez les noirs, par un rejet des Darks skin People. Je rajouterai que le Colorisme établit plus largement un rapport (inversement proportionnel) entre « opportunités » et « caractéristiques négroïdes » que sont la couleur de peau, le type de cheveux, les traits du visage. Parlons peu, parlons bien : Plus j’ai des caractéristiques négroïdes, et moins j’ai d’opportunités.
J’ai vécu dans une famille assez diversifiée, une maman Dark skin, une mamie Métisse – D’ailleurs, aussi loin que je m’en souvienne, cette dernière n’a jamais affirmé en être une, mamie si tu me lis (#teammamamiesurfsurlenet), comment te définis-tu ? étant le fruit d’une union Père Blanc, Mère Dark skin – ayant eu trois enfants : 3 déclinaisons différentes. Je n’ai jamais souffert du Colorisme dans ma famille et Dieu merci ; ma mère m’a toujours trouvé belle 🙂 Je vous l’accorde « Makak pa ka janmin trouvé timoun ay lèd » (L’amour rend aveugle).
En revanche, ma réalité était très différente en dehors de mon cercle familiale, l’affirmation de ma « non beauté » ne venait pas tant de moi mais des autres, comme une sorte de « Common belief » (croyance populaire), un avis presqu’objectif tant il est « normalisé » => #antithesesurantithese. Il était admis par la société, que mes caractéristiques physiques n’étaient pas suffisantes pour m’épanouir en tant que femme, objet sexualisé qu’on le veuille ou non – mais là n’est pas le sujet !
D’ailleurs une amie de l’époque me l’avait bien fait comprendre « Ahhh X sort avec toi !! C’est bizarre, il aime les métisses »… Comprenez ici, X te fait cette faveur de sortir avec toi… Quelle belle personne, il a un grand cœur (Bon ok, vous me prenez en flagrant délit d’exagération) ! Je vous expose cette petite anecdote très impertinente aujourd’hui avec le recul d’une jeune femme de 26 ans ayant entamée une vraie auto-thérapie (personnelle ?), d’estime de soi, de réappropriation de sa culture, de son histoire… mais en toute honnêteté il y a 10 ans, cette remarque m’avait largement affectée, certainement par manque de confiance en moi.
À 26 ans. Je suis super peinée de voir que les femmes noires Dark skin women soient autant discriminées dans le plus grand des calme, déçue de voir toute l’hypocrisie mise en scène pour mettre en avant les Femmes Noires, à croire qu’il est attribué aux Light skin women le monopole de la négritude, de la créolité ?!
Je suis triste de savoir ce par quoi nous passons avant l’ultime phase d’acceptation – pour les plus fortes ; de constater que nous ne sommes pas toujours désirables auprès des hommes de notre communauté; que certaines éprouvent le besoin de mettre des tissages / défrisage / wave / curls, s’adonner au contouring, bleaching pour se sentir « plus », comme pour diminuer leur caractéristique négroïde ?!!!
Petit aparté :
Pour moi le tissages lisses / défrisage / wave / curls, contouring, bleaching contribuent à adoucir, gommer les caractéristiques négroïdes, que sont les cheveux crépus, le nez épaté, la peau noire plus ou moins foncée. Pourquoi est-il admis, reconnu qu’un nez « fin » est plus beau qu’un autre ? Merci le contouring ! Si le tissage répond aux besoins de changement, de protection, de « je n’ai pas le temps de me coiffer le matin » ; Pourquoi ne voit on pas autant de tissage de type « cheveux crépus » ? Pourquoi les tissages de type cheveux lisses longs, bouclés ont-il aussi la côte ? Mais je vous l’accorde, nous sommes libres de faire ce que nous voulons !!! 🙂
Triste de savoir que certaines d’entre nous préfèrent le “light/whitelove” pour avoir de « beaux » métisses #pléonasme ?!, cela confère-t-il un autre statut social ? à croire que le métissage serait un remède contre les « tares » du Dark skin, une sorte d’ambivalence dans le fait de vivre et supporter la cause noire, tout en étant à l’abri de toutes les difficultés que peut apporter le fait d’être noir.
Décontenancée de constater que le Light skin-age, métissage, la peau chapée (comme on dirait chez moi), confère très tôt une certaine confiance en soi (presque) innée tant déconcertante. Aussi noire que je puisse être, confiante, et avec une grande estime pour ma personne acquise au fur des années, à aucun moment je me suis sentie légitimée en matière de beauté, au point de présenter ma candidature pour des shooting, ou autres par exemple. En discutant avec 3 messieurs Afro-Français Black skin comme ils se décrivent lors du festival Black Movie Summer, il en est ressorti le constat suivant : Nous ne pouvons pas sortir avec nos sœurs, sœurs ici désigne un lien affectif indéniable, mais à quel moment sommes-nous juste des Femmes aimables et désirables comme les autres ?
En bref, l’attraction pour le light skin, le nec plu ultra de la pureté, de la beauté prouve à quel point les traumatismes hérités de notre histoire sont conscientisés, et par la même occasion, normalisés. Il apparaît presque normal d’avoir une appétence pour le clair… ça semble tellement plus doux. (D’ailleurs en Espagnol, être en colère se dit “Estar negro”, cela m’avait particulièrement marqué !). A quel moment en sommes-nous arrivés là ? Je parle ici du fait d’avoir conscientisé toutes ces croyances infondées et immorales ? Comment cela a-t-il pu perdurer pour devenir une pierre angulaire de nos sociétés post-esclavagistes ? Il est important de reconnaître que 400 ans d’esclavage ont forcément laissé des traces, fait des ravages ; Il est vrai que la perfection occidentale a frappé les sociétés post coloniales de plein fouet, tant le clivage « nègres des champs » / « nègres de case » sévissait ; aujourd’hui encore le métissage, ou juste le « non Dark skin-age » semble être un « juste » milieu pour échapper à la misère, s’auto-élever, être reconnu sans avoir à s’être reconnu;
Reconnaître les dommages causés par notre histoire, ne signifie pas que l’on ressasse le passé et encore moins qu’on s’en abreuve. Je pense que reconnaître ces blessures c’est s’autoriser à faire un pas vers le mieux.
L’amour n’a pas de couleur, ni de religion, c’est le cœur qui choisit, les tripes qui aiment, le corps qui s’embrase, mais interrogeons nous sur ce qui a régit notre choix au départ ? Sommes-nous réellement libres dans nos têtes ? Libres de nos croyances ? Libres de nos choix ?
À « Amour » égal. Qui choisirez-vous ? Light skin or Dark skin ? Bien évidemment, les choses ne sont pas aussi binaires et ces unions n’ont pas toutes la même résonance. Je finirai par une citation de la série Being Mary Jane, « I like black men. I want black love » ; bien sure l’amour ne se prédit pas. Mais à choisir. Gimme my (Dark skin) BLACKLOVE. For sure !
Un grand merci à mes proches, qui de près ou de loin m’ont donnée leur avis sur ce sujet afin d’écrire ce Billet. Je vous ai livré en quelques lignes, toutes mes interrogations & réflexions sur ce sujet ..!
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