Savoir quoi répondre quand on me lance des remarques sexistes, racistes sur mon lieu de travail est une préoccupation quotidienne.
Répondre, se taire, éduquer les gens, faire de la pédagogie ? Difficile d’avoir le bon mot au bon moment.
Mon comportement est différent selon les situations : parfois je réponds, parfois je m’énerve parfois je fais de la pédagogie. Il m’arrive de ne rien dire mais dans ce cas je regrette amèrement. Quand je réponds on me dit que je suis trop agressive, que je n’ai pas d’humour et la situation se retourne contre moi.
Je trouve cela anormal de me retrouver dans ce type de situation car je suis la victime (n’ayons pas peur de ce mot, quand on est victime de quelque chose il faut le dire sans avoir peur de voir les détracteurs parler de victimisation à outrance).
J’ai donc décidé de traiter plusieurs situations afin de donner des clés pour permettre de réagir quand on est confronté à ce genre de situations/micro agressions sur son lieu de travail.
Et l’une des situations récurrentes c’est le fameux vous les noirs !
Un jour lors d’un rendez-vous professionnel, une personne racontait l’agression qu’elle venait de subir. On venait de lui voler son téléphone et visiblement ce vol avait été commis par des noir-es.
Cette personne décrit le vol puis s’arrête, elle me regarde, me demande de l’excuser pour les propos qu’elle va tenir puis la révélation tombe : « encore une fois ce sont des noir-es qui m’ont volé mon téléphone.
Nous étions 5 personnes (4 blanches +1 noire) autour de la table, y compris des élus du côté « gauche » de l’échiquier politique (supposés défendre les minorités ?, les clichés, les préjugés ?) mais personne n’a relevé. Le fait qu’elle s’excuse auprès de moi car je suis noire et que potentiellement je puisse d’une manière ou d’une autre soutenir ce vol, voir même en profiter, que je devais forcément connaître ces voleurs parce qu’ils étaient noirs n’a choqué personne.
Pourquoi cette personne s’est excusée avant de dire que des noirs avaient volé son téléphone ? Parce qu’elle partait du principe que ses propos allaient me blesser.
Parce qu’elle partait du principe qu’un acte commis par un noir devait être assumé par toute sa « communauté ». Ce qui n’est absolument pas le cas pour une personne blanche. Jamais on n’entendra une personne blanche s’excuser du comportement d’une autre personne blanche.
« Ah tu viens de te faire voler ton sac par un blanc ? »
« Ok, désolé au nom de toute la communauté blanche, je m’excuse ? »
Qui a déjà entendu ce genre de phrases ? Je pense que personne !
Alors pourquoi quand une personne se fait voler son téléphone par un noir, elle me regarde en pensant que je vais lui dire : « ah on t’a volé ton téléphone, un noir ? ok au nom de toute la communauté noire je m’excuse ! »
R I D I C U L E n’est-ce pas ?
Pour en revenir à ce fameux rendez-vous, j’ai indiqué que je ne connaissais pas l’ensemble des noir-es de la terre, que ces personnes qui avaient volé le téléphone je ne les connaissais probablement pas et qu’elle n’avait pas à s’excuser de ces propos sous prétexte que ces derniers puissent me blesser. Ils ne me blessent pas parce que les gens qui lui ont volé son téléphone n’ont rien avoir avec moi et que même si c’étaient mes frères, mes sœurs, mes copains, mes cousins peu importe ce n’étaient certainement pas à moi de m’excuser. Ce n’est pas moi qui ai volé ce téléphone alors pourquoi je devrais en subir les conséquences ?
J’ai aussi spécifié que les crimes, les délits n’ont pas de couleur, que ces personnes lui ont volé son téléphone car ce sont des voleurs et non pas parce qu’ils sont noirs.
Ce genre d’incident arrive souvent. Parce que vous êtes noirs, on vous impute des crimes, des comportements commis par d’autres noirs. Dans la société française on a tendance à pointer du doigt le communautarisme à le rendre responsable de beaucoup beaucoup de maux mais on a aussi tendance à penser à tort que les noirs en France forment un ensemble homogène, avec les mêmes règles, les mêmes pensées, les mêmes religions, qu’ils sont tous de la même famille, qu’ils se connaissent tous ect etc
Plusieurs amies racisées m’ont déjà dit que leur chef par exemple avant de les embaucher, leur avait tenu des propos du style : “Ah nous on a déjà eu une noire dans notre service” ou encore « on avait une africaine dans notre service mais elle est rentrée au pays » oui et ???
Dernièrement je me baladais en t-shirt dans mon bureau et une collègue sortie de nulle part m’a dit sans la moindre pression : « ah oui mais vous les noirs vous avez toujours chaud !».
Non en fait ce n’est pas parce que je suis noire que j’ai chaud, c’est juste parce que dans le bureau il fait 30 degrès car le chauffage est déréglé !
Il faut bien faire comprendre aux personnes qui tiennent ce genre de propos que vous avez votre individualité.Vous avez votre propre personnalité, ne pas respecter cela et vous renvoyer systématiquement à une pseudo communauté c’est insultant et irrespectueux. Ne pas dire vous les noirs, parce que je vous assure que je ne connais pas l’ensemble des noirs de France, de la terre, parce que en disant ça vous m’enlevez le droit à avoir une identité propre, parce que quand je m’adresse à vous je ne dis pas vous les blancs, parce que encore une fois mon identité est multiple et qu’être noir ne définit pas qui je suis et ce à quoi j’aspire !
Saffï
Bonjour, super page vraiment continuer ainsi.
En ce qui me concerne, je trouve que celle qui perd le plus d’énergie dans tout cela c’est bien la personne noire. A quoi bon se placer d’office en position de victime? Pourquoi se vexer et développer sur le degrés d’implication de tous les noirs dans un crime qui ne vous concerne en rien? On entend bien des propos comme ” vous les blancs dès que vos parents sont vieux vous les foutez en maison de retraite en attendant qu’ils crèvent et récupérer l’héritage” et évidemment que non ça ne vaut pas pour tous les blancs. Ce que je veux dire par là c’est qu’il faut vraiment se mettre à la place de celle qui se justifie auprès d’une noire avant de dire quelque chose de négatif sur la communauté noire. (Valable pour toutes les communautés quelles qu’elles soient d’ailleurs) Pourquoi le fait-elle réellement? Pourquoi faire le choix d’être la victime plutôt que du sage? La pédagogie vous avez raison c’est très bien. La communication c’est parfait. Le braquage…. pour quoi faire? C’était moi. Je ne commente absolument rien de rien même sur les réseaux sociaux mais là j’avais envie de le dire car j’aime vraiment beaucoup votre page et j’espère qu’elle verra encore plein de beaux jours et d’autres rédactrices de talent, et surtout engagées. Cheers my Queens!