Notre QUEENSPIRATION de la semaine s’apelle Mélissa Ntumba Mukendi. Elle est la fondatrice de la plateforme L’Afropolitaine, un espace de libre parole dédié aux femmes noires. Elle nous parle de son initiative, de ses projets et de sa position face à la question de la représentation.
RTM | Bonjour Mélissa, quels sont les mots que tu choisirais pour te décrire ?
Mélissa | Je suis paradoxale. Je suis à la fois tout et son contraire. Je suis là où l’on ne m’attend jamais.
RTM | Tu es la fondatrice de L’Afropolitaine, un espace libre de parole et de réflexion réservé aux femmes noires. Comment et quand est né ce projet?
Mélissa | L’Afropolitaine un espace de libre-parole et de réflexion dédié aux femmes noires et qui se veut INCLUSIF. Cet espace a été créé le 28 octobre 2019.
Le concept est venu d’une réflexion que je me suis faite, il y a de cela maintenant quelques années. La diaspora afropéenne est très dynamique depuis un bon bout de temps et les évènements autour de la culture afro sont de plus en plus nombreux.
Nous avons besoin de nous retrouver, d’échanger entre nous et les occasions de le faire se multiplient grâce aux initiatives qui voient le jour au sein de la communauté noire en France. Je trouve cela génial et très prometteur.
Toutefois, j’ai souvent eu le sentiment que les sujets de fond étaient souvent écartés, voir pas du tout abordés.
Je me suis donc dit qu’il fallait que je propose un espace bienveillant et respectueux où l’on pourrait réellement évoquer nos réalités, “panser et repenser nos pensées”, évoquer et “soigner nos maux par nos propres mots”, sans censure, mais également envisager et proposer des solutions ENSEMBLE.
L’Afropolitaine, c’est également un bel hommage à ma grand-mère, la première Afropolitaine de ma famille, qui a quitté son pays, très jeune, intégrer un autre pays, une autre culture et qui s’est ainsi construit une identité plurielle.
RTM | Comment définirais-tu une afropolitaine ?
Mélissa | Une Afropolitaine est une personne à la culture métisse. Un mélange de son pays d’accueil, son pays d’origine, de sa personnalité et de ses racines africaines.
C’est une personne qui est née/ou a grandi dans un pays autre que celui de ses origines.
Cette pluralité culturelle fait de moi L’Afropolitaine que je suis.
RTM | A chaque édition, vous abordez un sujet spécifique. Comment se fait le choix des sujets ?
Mélissa | Le choix des thématiques se fait avec le temps (sur 3-4 mois de préparation), des recherches approfondies et surtout le coeur, dans la mesure où j’ai besoin de me sentir pleinement investie pour aborder un sujet. Ce sont des sujets qui me parlent d’abord. Et ensuite j’essaie de sensibiliser celles et ceux qui le souhaitent sur ces sujets de société.
RTM | Lors d’une édition, vous avez abordé la question de la santé mentale des femmes noires. C’est un sujet dont on parle de plus en plus mais sur lequel il reste beaucoup à dire. Qu’en est-il ressorti ?
Mélissa | Il en est ressorti tellement de choses mais je voudrais mettre un point d’honneur sur celui ci : l’importance de laisser les personnes qualifiées (psychothérapeutes, psychologues…) en parler. Même si ce sujet se démocratise et c’est très bien d’ailleurs, tout le monde n’est pas en mesure de donner les informations nécessaires et d’utilité publique dont les gens ont besoin. C’est la raison pour laquelle, j’ai fait appel pour cette première conférence à une ethnologue-psychologue et une psychologue du travail pour aborder cette thématique importante.
RTM | On parle encore du manque de représentation des noir.e.s en France bien que les choses évoluent très doucement. As-tu l’impression que les choses bougent ?
Mélissa | Je pense qu’elles bougent sur les médias alternatifs (Instagram…) mais pas dans les medias dits traditionnels. Elles bougeront davantage, dès lors que nous serons à la tête de plus en plus de médias. Ne quémandons plus, créons nos médias, nos espaces, nos structures.
RTM | Selon toi en quoi les réseaux sociaux, des plateformes comme Instagram ou Facebook peuvent-elles permettre de faire bouger les choses ?
Mélissa | Sur ces plateformes, il n’y a pas de censure et nous avons accès au monde entier. Chacun.e peut faire entendre sa voix. L’Afropolitaine n’existerait pas sans Instagram. Elles nous donnent la possibilité d’être vu et enfin entendu.
RTM | Pourquoi était-ce important selon toi d’offrir aux femmes noires des espaces de réflexion ?
Mélissa | Parce que parler, échanger sont des besoins vitaux chez les êtres humains, en particulier les femmes. Nous avons besoin de nous exprimer dans un cadre sain et bienveillant dans un monde hostile et où nous courrons sans cesse.
Parce que la connaissance prévient l’ignorance et que la méchanceté émane aussi de l’ignorance, L’Afropolitaine se donne aussi avec cet espace, la mission d’INFORMER et d’aborder des thématiques existentielles qui concernent directement la diaspora féminine et masculine africaine, avec le concours de personnes noires, spécialisées et habilitées à en parler.
C’est en luttant contre les diverses formes d’analphabétisme qui perdurent au sein de notre communauté, que nous pourrons ainsi investir pleinement “les champs de nos possibles” et avancer réellement.
RTM | Peux-tu nous citer 3 afropolitaines qui t’inspirent ?
Mélissa | Ma grand-mère, ma mère et Scheena Donia.
RTM | Quels sont les projets à venir de L’Afropolitaine ?
Mélissa | Une saison 2 pour le podcast de L’Afropolitaine, une mini série de podcasts où la parole est donnée aux hommes africains. Des ateliers d’écriture créative, des groupes de parole, et tellement de choses…
RTM | Et enfin, qu’est-ce qui fait de Mélissa une Reine Des Temps Modernes ?
Mélissa | Je suis une Reine des Temps modernes , parce que j’ai pris la décision de le devenir, de l’être et de le rester!