Catia Mota Da Cruz, directrice artistique de la Revue BlackAttitude

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Kelly Costigliolo

Catia Mota Da Cruz  est la co-fondatrice et directrice artistique de la revue BlackAttitude. Egalement danseuse de profession, elle fit partie de la comédie musicale Fela ! qui secoua Broadway. Rencontre avec notre QUEENSPIRATION du jour !

Photographe : Prisca Monnier

RTM | Pourrais tu te présenter à nos lectrices et lecteurs ? 

Catia | Je m’appelle Catia Mota Da Cruz. J’ai 36 ans. D’origine capverdienne, je suis née au Portugal mais j’ai grandit et étudié en France.

Je suis danseuse professionnelle et directrice artistique depuis maintenant 4 ans. Avec ma partenaire Prisca M. Monnier, nous sommes à l’origine de la revue BlackAttitude.

RTM | A quelle moment tombes tu amoureuse de la danse ?   

Catia | Ca fait un peu cliché de dire ça, mais aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours dansé.  J’ai toujours rêvé de devenir danseuse. A toutes les rentrées scolaires lorsque l’on nous demandait le métier que nous voulions exercer plus tard, je répondais danseuse étoile.

Je ne suis clairement pas devenue danseuse étoile, mais j’ai cependant pratiqué le ballet pendant une dizaine d’années au conservatoire.  J’ai commencé par le classique mais parallèlement je me produisais déjà sur scène avec ma cousine pour des shows afro caribéens. Plus tard j’ai intégré l’académie internationale de la danse (l’AID) où j’étais sous contrat pour une comédie musicale. De fil en aiguille les belles rencontres se sont enchaînées ainsi que les contrats avec des styles pouvant passer du moderne au street jazz ou afro, brésilien etc.. J’aime l’idée d’être polyvalente et de ne pas m’enfermer dans une discipline.

La danse a toujours été là.

RTM | Tu as d’ailleurs été l’une des reines de la comédie musicale Fela !. Comment s’est présentée cette opportunité ?

Catia | La merveilleuse aventure Fela ! … Il y avait un casting qui se déroulait sur Paris et qui n’était pas prévu au départ. J’ai passé le casting et j’ai été retenu pour le call back à Londres. 

J’y suis allée sans vraiment trop y croire. Je passe un nouveau casting : chant, danse… Et là je reçois un coup de fil qui m’annonce que je suis prise pour interpréter l’une des Fela Queens. Les représentations ont duré 1 mois et demi au National Theatre de Londres.

Ravi par son casting européen Bill T. Jones, le chorégraphe du show, décide de garder une partie de l’équipe pour rejoindre la tournée européenne puis américaine et me voilà repartie pour 2ans avec un passage sur Broadway en cadeau.

Au delà de la danse, c’était une aventure Exceptionnelle.

RTM | En quoi cette expérience t’a-t-elle marquée ? 

Catia | C’est très difficile à raconter. C’était tellement intense et enrichissant à tellement de niveaux. Mais je savais à ce moment là pourquoi je faisais ce que j’étais entrain de faire. Je me sentais à ma place, en tant que danseuse mais surtout en tant que danseuse africaine. J’étais assez fière de transmettre le message de Fela Kuti sur scène, un message totalement pertinent aujourd’hui encore.

Et puis la musique, c’était un génie.

 

 

RTM | Depuis 4 ans, tu t’es orientée vers la direction artistique. Comment s’est opérée cette reconversion ?    

Catia | Suite à l’aventure Fela !, j’ai eu envie d’autres choses. Cependant, je savais que je voulais rester dans l’univers artistique et faire quelque chose qui me passionne. Je ne voulais pas forcément rester dans le monde de la danse, je ne voulais pas que la danse devienne un simple job. Et j’avais eu ma pépite.

De retour à Paris, une amie Aïcha Ballo me demande de l’aider pour le shooting de son concept Afro Gourmet. Je  me retrouve donc sur un set de 9h à 1h du matin à gérer le stylisme, la direction des modèles…Je n’ai pas vu cette journée passer et j’ai juste adoré. Je me sentais dans mon élément. J’ai eu un déclic.

Suite à ce shooting, Aïcha me présente Prisca, qui est ma partenaire aujourd’hui.

Prisca est photographe et graphiste, et on commence à collaborer, elle sur la partie photo, moi sur la direction artistique et stylisme. C’est fusionnel et on a très vite envi d’aller plus loin artistiquement.

C’est comme ça qu’est né le DUO BlackAttitude ainsi que la revue papier annuelle du même nom. On avait besoin d’un support que l’on puisse toucher, sentir, garder..

Au départ, j’ai voulu faire des formations car on sait tous que la France a besoin de ses diplômes. Mais je me suis fait confiance et me suis dit que j’allais continuer à me former sur le terrain. D’autres marques et artistes m’ont fait confiance depuis pour leur direction artistique.

RTM | Peux-tu nous en dire plus sur votre vision au lancement de la revue BlackAttitude ?

Catia | On ne se retrouvait pas dans ce que l’on voyait dans les magazines. Ca ne nous parlait pas, on ne se sentait pas représenté et surtout ça ne disait pas ce que l’on avait envie de dire. On voulait raconter nos propres  histoires à travers la photographie, rencontrer et raconter ces artistes punks qui font des choses exceptionnelles avec leurs tripes, qui sortent des cases.

BlackAttitude, c’est un résumé de notre année avec pour fil conducteur la quête de ce noir profond au fil de nos voyages.

 

Photographe : Vivianne Sassen

 

RTM | Comment sélectionnez vous vos coups de cœur ?

Catia | Il n’y a pas une méthode type, ça peut être autour d’une destination que l’on aimerait visiter. On a besoin d’aller sur le terrain, de rencontrer les personnes dans leur environnement et surtout de creuser afin de savoir s’ils ont cette BlackAttitude. 

Les rencontres se font de manières relativement naturelles.

Parfois ce sont aussi des coups de cœur que l’on a sur la toile et on prend ensuite la décision de les rencontrer physiquement. Ça peut être absolument n’importe où on ouvre l’œil! LOL  

 

Modèle : Abdoulaye Barry 

Photographe : Prisca Monnier

Direction artistique : Catia Mota Da Cruz

 

RTM | Quelles sont les destinations qui  t’ont le plus marqué pour le moment ?

Catia | J’ai eu un vrai coup de cœur pour Johannesburg. L’énergie y est particulière.  Une vraie effervescence créative, un vrai besoin de s’exprimer à travers l’art.  

Le Congo Kinshasa aussi m’a beaucoup marqué. Partir au village dans le Bandundu c’était une expérience spéciale. Quand j’y suis, je me sens dans mon élément. 

RTM | A quand prévoyez vous le prochain numéro ?

Catia | BlackAttitude est une revue annuelle. Le prochain numéro est donc prévu pour courant 2018. Pas de date précise encore. La jolie nouvelle de cette fin d’année c’est l’arrivée du petit bout de Prisca. 

Nos futurs déplacements sont planifiés, on prend notre temps. Pour raconter de belles histoires, il faut prendre le temps de vivre les choses.

RTM | Que signifie pour vous l’expression « BlackAttitude » ? 

Catia | Blackattitude c’est un état d’esprit, c’est une façon de vivre et se raconter à travers un art, sans fioritures, BRUT.

C’est Punk quoi!

Cela n’a pas toujours été facile de l’expliquer avec des mots, notre spécialité c’est l’image. C’est la raison pour laquelle nous avons voulu le montrer à travers la revue.

Pour certains l’emploi du mot “BLACK” est problématique et nous enfermerait dans une case, ou alors on n’oserait pas dire Noir..… Bref tout l’inverse de notre vision et notre allergie pour les cases. 

Évidement on adore ça et on fonce.

BlackAttitude c’est tout sauf réducteur. 

RTM | Où peut-on se procurer le magazine ?

Catia | A Paris, nous sommes distribués chez Colette, Agnès B, KD Presse, Libraire OFR et La régulière. Nous sommes aussi distribués à Marseille, à la librairie Pantagruel. Malheureusement ou heureusement, il est épuisé dans la plupart de ces librairies. Mais il est encore possible de le commander en ligne.

www.blackattitudemagazine.com 

Nous sommes également distribués à l’étranger : Italie, Allemagne, Danemark, Etats-Unis.

 

 

RTM | Quel a été ton plus gros frein dans ta carrière ? 

Catia | C’est soi même. Je n’en vois pas d’autres. C’est soi et son manque de confiance à un moment donné. Ma mère me répète depuis toujours “quand une porte se ferme, une autre s’ouvre” et j’y crois .Si ça n’a pas fonctionné à un moment donné, c’est que ce n’était pas pour moi. C’est normal de se remettre en question mais ça ne justifie en aucun cas l’abandon. Certaines personnes pensent justement que c’est facile de vivre de sa passion, mais non, il faut vraiment le vouloir parce que tu ne vas clairement pas te la couler douce. C’est tellement aléatoire. Aujourd’hui tu voyages en 1ère classe, hôtel 5*, Les plus grosses scènes, puis le lendemain tu prends ton métro pour rentrer chez toi, des pâtes aux beurre à dîner, et ainsi de suite… La seule constance c’est ton amour pour ce que tu fais. 

RTM | Quelles sont les femmes qui ont pu t’aider à te construire ?

Catia | Ma réponse ne sera sûrement pas originale, mais ma maman. Elle m’a toujours soutenu, elle ne m’a jamais rien interdit. Quand elle a pu m’inscrire au conservatoire, elle l’a fait, car elle savait que j’adorais la danse. Elle m’a toujours accompagné. Jusqu’à maintenant, c’est la « number one ». 

J’ai grandit dans une famille de femmes, ma grand-mère, ma mère, mes sœurs, mes cousines. Il n’y a pas forcément d’autres artistes dans la famille. Nous avons toutes des parcours différents. Mais on s’encourage toutes quelques soient nos choix.

RTM | Où est-ce que tu puises ta confiance en toi aujourd’hui ?

Catia | C’est difficile comme question car Je n’ai pas réellement confiance en moi. On n’est jamais totalement sûr de soi.

Je suis une grande timide sauf sur scène ou sur un plateau de shoot.

Quand on fait quelque chose que l’on aime, la passion parle avant tout.

Ma force, je pense que je la puise surtout dans mon entourage le plus proche, ma famille, mes sœurs, ma maman.

J’ai toujours su que les bureaux, ça n’était pas fait pour moi. Je ne dis pas que demain, je ne serai pas amené à travailler dans un bureau, parce que je ne sais pas de quoi est fait l’avenir, mais tant que je peux avoir le choix, tant que je peux pousser et me donner les moyens de continuer, je fonce.

 

Crédit : Duo BlackAttitude

RTM | Qu’est ce qui fait de Catia une Reine Des Temps Modernes ?

Catia | C’est à toi de me le dire?? LOL 

Je ne me définis pas comme tel. Mais je pense que dans la vie il faut aller vers ce qui nous passionne. Je le répète en boucle à mes nièces. Tu n’es pas obligé d’avoir toutes les réponses entre les mains, tu ajusteras au fur et à mesure. 

Je pense qu’une Reine Des Temps Modernes, c’est la femme qui agit malgré les peurs et qui s’écoute. Quelque soit le domaine dans lequel tu évolues, qu’il soit artistique ou non, il faut savoir s’écouter, aller au bout des choses et s’en donner les  moyens.

Je suis convaincu que si la passion est là tôt ou tard elle te rattrape que ce soit à 50, 60 ou 70ans. Alors gagne un peu de temps. Peut être que j’en suis une Reines des temps modernes après tout 😉

 

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