Notre QUEENSPIRATION du jour nous fait voyager et rêver à travers son art : la photographie. Originaire de Martinique et mordue de photo depuis son plus jeune âge, elle vit maintenant de sa passion. Rencontre avec la talentueuse Aurélie Chantelly, ses projets colorés et emplits d’émotions.
RTM | Bonjour Aurélie, peux-tu te présenter pour nos lectrices et lecteurs ?
Aurélie | Je suis Aurélie Chantelly, j’ai 24 ans, je suis photographe dans le domaine de la mode. J’ai fait un Bac Pro commerce, je voulais d’abord faire du commerce international et à côté de la photographie, mais cette dernière prenait beaucoup de place de ma vie. J’ai donc décidé de faire une école de photographie à Paris et de me lancer.
RTM |D’où vient ton inspiration ?
Aurélie | Ma première inspiration est mon île, la Martinique, sa population, son caractère… J’aime mettre en avant les femmes martiniquaises qui s’assument de par leurs personnalités et leurs mentalités. Avec le temps, je me suis beaucoup inspirée de la culture et des couleurs de mon île que j’ai commencé à mélanger au monde contemporain. La danse, ma seconde passion, est aussi une source d’inspiration. Cela se voit dans mon style qui va vers tout ce qui est sportswear et streetwear. J’adore mixer la nonchalance et la haute couture, donc tout ce qui est paradoxale mais qui reste harmonieux.
RTM |Quelles sont selon toi les 3 qualités à avoir pour se lancer dans la photographie ?
Aurélie | L’une des premières qualités est l’ouverture d’esprit. Cette qualité m’a permis d’aller chercher plus loin que l’esthétique et par exemple avoir un propos dans mes photos. Il faut également avoir de la culture visuelle et historique. La troisième qualité est l’audace. Il ne faut jamais rien attendre des gens, ne jamais rien considérer comme acquis. Il faut se déplacer, envoyer des emails, saisir les opportunités.
“J’ai beaucoup plus de facilité à me projeter et à être inspirée avec des modèles féminins. Il y a quelque chose d’instantanée.”
RTM | Peux-tu nous citer une difficulté rencontrée dans le cadre de ton activité ? Comment l’as-tu surmonté ?
Aurélie | C’est compliqué d’être une femme dans le monde de la photo. Tout particulièrement dans le domaine de la mode qui est composé à 98% d’hommes. Mais il faut tout de même souligner qu’il y a de plus en plus de femmes photographes et les choses commencent à changer. C’est également compliqué d’être photographe professionnelle et d’être Freelance, il peut y avoir des périodes creuses tout comme des périodes très remplies. J’ai cependant la chance d’avoir développer un certain réseau de par mes origines antillaises et ma pratique de la danse. Ce qui m’aide beaucoup professionnellement.
RTM | Il y a t-il une différence de perception de ton art entre les Antilles et l’Hexagone ?
Aurélie |Mon travail est très bien accueilli dans les Antilles par rapport au mélange mis en avant. En France, l’accueil reste tout de même mitigé. Les personnes de la culture street, eux, m’accueillent à bras ouvert car mon travail se positionne dans cette catégorie qui est grandement composée de personnes de couleur. Cependant, mon travail peut rester incompris auprès de certaines personnes. Ce fut le cas avec certains de mes professeurs qui avaient du mal à accepter mon côté street. Ils étaient habitués à un style plus contemporain, à une mise en avant d’une beauté plus classique. Il y a un vrai manque de diversité qui ne valorise pas les différentes facettes de la mode.
RTM | Peux-tu nous citer 3 femmes qui t’inspirent et qui a leur manière t’ont permis d’être la femme que tu es aujourd’hui ?
Aurélie | Ma mère est ma source d’inspiration primaire. C’est une battante, c’est elle qui m’a poussée à faire de la photo et c’est grâce aux valeurs qu’elle m’a transmise que je suis là où je suis aujourd’hui.
Rihanna également, de par sa beauté, son style et son image. Dès mes années en école, elle était toujours présente dans mes mood boards. Elle représente bien ce que je fais dans ma photo : de la nonchalance mixée à de l’artistique. Si je devais citer quelqu’un des îles , je dirais Jocelyne Beroard car c’est une icône de la culture caribéenne. J’adore sa manière de mettre en avant notre culture et d’en parler ouvertement dès qu’elle en a l’occasion.
RTM | Que préfères-tu photographier ?
Aurélie | Je photographie souvent des femmes avec de fortes personnalités et du caractère. Des femmes qui sont fières d’être elles même. Je veux casser les codes esthétiques de la mode en prenant des gens qui m’inspirent et qui me font ressentir des choses dans leurs manières de parler et de s’habiller. J’ai beaucoup plus de facilité à me projeter et à être inspirée avec des modèles féminins. Il y a quelque chose d’instantanée. J’ai dû photographier 95% de femmes depuis que j’ai commencé et le pire c’est ce que c’est involontaire.
RTM | Quel est l’importance des réseaux sociaux dans ton métier ?
Aulérie | Instagram est clairement une fenêtre sur le monde. C’est un réseau assez éphémère avec lequel j’ai pu proposer mes travaux à plusieurs magazines dont le magazine Féroce qui sortira le projet en octobre. J’ai également proposé mon travail à Modish ainsi qu’à un magazine aux Etats-unis. Instagram permet donc de collaborer avec des marques et des artistes. Aujourd’hui, on ne peut pas se passer d’Instagram au niveau de la visibilité. Même si parfois il peut y avoir des problèmes de crédits, mais bon c’est l’ingratitude du métier.
RTM | Qu’est-ce que tu nous réserves de bon pour les prochains mois ?
Aurélie | Pour les prochains mois, j’aimerais mettre encore plus en avant la culture caribéenne. Raconter mon histoire à travers mes photos. J’aimerais bien apporter ce côté culturel à la mode. D’un point de vue stylisme, j’aimerais beaucoup parler des tenues traditionnelles martiniquaises, en les remettant au goût du jour avec des coupes actuelles. J’aimerais également continuer ma série Caribbean Project qui parle des quartiers délaissés en Martinique. Je veux parler des habitants de ces communes. Je veux apporter un regard nouveau sur des endroits que les Martiniquais n’osent pas forcément explorer. De plus, j’ai commencé un projet l’année dernière qui s’appelle Frontière qui mixe la danse à la mode.
RTM | Quel est ton plus grand rêve en tant que photographe professionnelle ?
Aurélie | Je répète tout le temps que mon premier rêve serait de shooter pour Nike. C’est une marque avant-gardiste qui a toujours su se renouveler et qui met en avant des profils qui cassent les codes en mettant en avant des femmes noires, rondes etc. Ce sont des valeurs que je valide.
RTM | Qu’est-ce qui fait d’Aurélie, une Reine Des Temps Modernes ?
Aurélie | Je suis une Reine Des Temps Modernes car j’apporte une vision de la culture des Antilles moderne. La culture est souvent vu comme quelque chose d’ennuyeux et de has-been. Mon but est d’exporter notre culture afin que les gens se rendent compte de sa richesse.