©XavierDollin
« Tandis que la raison parle, la passion exécute ». Les actes plutôt que les mots. Je pense que cette citation résume parfaitement le caractère de notre Reine Des Temps Modernes de la semaine.
La passion de notre portrait de la semaine, c’est la musique. Une passion qu’elle se découvrit tardivement mais cela ne l’empêcha pas de se donner les moyens d’aller au bout de ses rêves.
Elle s’appelle DJ Anaïs B et elle a aimablement accepté de nous parler de son parcours et de ses projets.
Wendie – Bonjour Anaïs, tout d’abord peux-tu te présenter à nos lecteursJ… Qui est DJ Anaïs B ?
Dj Anaïs B – Bonjour Wendie. Je m’appelle Anaïs. Dj Anaïs B, c’est mon nom de scène. Je suis née à Paris. Je suis originaire de la Guadeloupe par mon père et du Sénégal et de l’Allemagne par ma mère.
Je n’étais pas du tout vouée à devenir DJ au départ. J’ai eu un parcours classique. Suite à l’obtention de mon BAC, je me suis orientée vers un BTS Tourisme. Je ne savais pas trop ce que je voulais faire, mais je voulais voyager. Une fois mon BTS en poche, je me suis orientée vers tout ce qui avait attrait à l’aéroportuaire. J’ai été agent d’escale, hôtesse de l’air. J’ai aussi travaillé à l’Eurostar entre Paris et Londres.
Un jour, je fais la rencontre d’un tourneur, un « booking agent ». A ce moment là, il était à la recherche d’une assistante pour travailler avec lui. Etant donné que le milieu de la musique était un milieu qui m’avait toujours attiré, je postule pour le poste. Au final, je suis prise. Pendant deux ans, on travaille ensemble. On s’occupait de booker des artistes américains majoritairement pour l’Europe, l’Afrique et le Moyen-Orient.
C’est pendant cette période que je fais la rencontre d’une DJ qui s’appelle Rashida. Elle a été la DJ de Prince et de Kelis pour ne citer que ces deux artistes. Au moment où je devais la booker, je me suis retrouvée avec son presse kit, j’ai découvert sa biographie, ses vidéos, son travail et j’ai eu une petite révélation. C’est ce qui m’a donné envie d’essayer et de me dire pourquoi pas moi.
Du coup, quelques temps plus tard, je décide de partir trois mois à New-York. J’avais des amis DJs là bas. Je décide de partir apprendre. Je prends des cours, j’apprends à utiliser le matériel, je me fais la main.
Wendie – Au cours de ce voyage, à quel moment te dis-tu que c’est ce que tu souhaites faire de ta vie ?
Dj Anais B – À mon arrivée à New-York, mon objectif était surtout d’apprendre le métier, techniquement parlant. J’accompagnais mes amis en soirée et j’observais. Dj, ce n’est simplement passer de la musique, c’est aussi beaucoup d’analyse, une analyse de la foule. On ne s’est jamais qui on en a face de nous dans le public, il faut toujours s’adapter à son public.
Un set, ça ne se prépare pas à l’avance. C’est au feeling. Tu prépares, certes, une playlist de sons que tu aimerais passé mais ensuite il faut s’adapter.
Ce séjour m’a appris à analyser les gens, savoir comment tester la musique sur le public.
C’est ce qui m’a plu et c’est à ce moment que je me suis rendue compte que j’avais envie de me consacrer à cela. Ca fait maintenant quatre ans et demi que je suis DJ.
J’aime le contact avec le public. Je trouve ça extraordinaire de voir le plaisir que la musique procure sur les visages, les corps. J’ai toujours aimé la musique et si je peux faire plaisir aux gens avec ma musique, c’est encore mieux.
Wendie – Comment a réagit ton entourage quand tu leur as annoncé que tu voulais devenir DJ ?
Dj Anaïs B – Je ne l’ai pas annoncé tout de suite à mes parents. J’ai attendu que ça marcheJ. J’avais peur de leur réaction. Aux yeux des parents, ce n’est pas forcément évident de comprendre ces choix de métiers artistiques. Au final je pense que je me suis mis une pression inutile car ils ont très bien réagit. Ils ont eu une réaction très positive.
Je pense qu’ils sont contents de me voir épanouie dans ce que je fais et que j’aime mon métier.
Il y a beaucoup de personnes qui font des métiers qu’ils n’aiment pas depuis des dizaines d’années. Ils étaient contents de voir que j’avais trouvé ma voie.
Wendie – Au delà de ton métier de DJ, tu fais aussi de la création de prods. Tu produits de la musique, des beats. C’est quelque chose que tu souhaites développer ?
Dj Anaïs B – Oui, complètement. J’aime mixer en boîte de nuit, mais j’ai envie de créer de la musique qui puisse passer en radio et traverser les frontières. J’ai envie de pouvoir créer des tubes, des sons qui rassemblent. Tout cela sans jamais me travestir. Je pense que c’est en cela que réside la difficulté : réussir à faire de la bonne musique qui me ressemble.
Wendie – Comment décrirais-tu ton univers artistique ? Qu’est-ce qui caractérise la musique de DJ Anaïs B ?
DJ Anais B –Je pense avoir deux univers. Il y a la musique que je mixe en club. Généralement, je m’adapte un minimum au club dans lequel je vais. C’est aussi la raison pour laquelle je suis très sélective au niveau des clubs que je choisis. En club, je passe les hits que je valide et qui vont plaire mais je vais aussi passer des découvertes, car pour moi, c’est aussi ça le rôle d’un DJ. Il y a un aspect pédagogique. Je vais passer des sons qui ne passent pas en radios, que j’aurais découvert sur SoundCloud ou autre mais qui méritent d’être entendus. C’est important de faire découvrir de nouveaux sons, de nouveaux artistes.
Puis, il y a la musique que je partage via mon SoundCloud, la musique que je crée, les playlists que je fais. Là, je peux vraiment y mettre ma touche. Je peux partager mes découvertes, faire connaître mes influences : musique du monde, futurbeats, musique indienne, musique tropicale, electro, hip-hop…
Mon objectif est de pouvoir de plus en plus jouer les styles de musique que je met en avant sur mon Soundcloud en club : le jersey club, la trap ou le futurbeats.
Wendie – Qu’est-ce qui inspire tes créations musicales ? Où puises-tu ton inspiration ?
Dj Anais B – Mes voyagent m’inspirent beaucoup. J’ai la chance de pouvoir voyager énormément avec mon métier. Ce qui me permet de sans cesse découvrir de nouvelles sonorités.
J’écoute aussi énormément de musique. Je fouille beaucoup sur Soundcloud. Je suis très curieuse. Je m’inspire de mes découvertes, des nouveautés. J’aime mélanger les sonorités et essayer de nouvelles de choses.
Wendie – Comment on se fait sa place sur la scène parisienne en étant « DJette » ?
Dj Anaïs B – C’est vrai qu’en France, dans le milieu du hip-hop notamment, il n’y a pas beaucoup de femmes. Mais si de manière générale, les DJettes sont de plus en plus nombreuses. Pour se faire sa place, il faut s’imposer, ne pas se poser trop de questions.
Il ne faut pas écouter les « on dit » et se faire confiance. Je me suis dit que j’allais être DJ et aujourd’hui je le suis. J’y suis allée au culot.
Je pense même que c’est un avantage d’être une femme DJ parce qu’on fait la différence. On apporte une touche féminine.
Je pense que c’est important d’avoir son identité, d’arriver avec son univers, son ambiance. Ce qui me démarque, c’est peut-être ma passion pour ce métier, je pense que ça se ressent dans les échanges qu’il y a entre le public et moi.
Wendie – Quelles sont les difficultés que tu as pu rencontrer pour en arriver là ?
Dj Anaïs B – Au début, comme dans toute nouvelle aventure, tu prends un risque. Lorsque j’ai arrêté mon métier d’agent artistique pour devenir DJ, j’ai pris un risque. Je sortais un peu de nul part, personne ne me connaissait.
Les six premiers mois ont été difficiles. Il fallait que je me fasse connaître, que je fasse connaître ma musique, que je me fasse ma place simplement auprès des bookers, des clubs… Je n’ai pas lâché. Je ne me suis pas vraiment laissée le choix. C’était « ride or die ». Je me suis dit, c’est soit j’y vais à fond, soit je n’y vais pas du tout. Je ne voulais pas faire les choses à moitié, continuer de travailler dans le booking et tenter une carrière en parallèle. Finalement, ça a payé.
Aujourd’hui je vis de mon métier.
Wendie – On va parler de ton actualité. Est-ce que tu peux nous parler du concept « Bonnie & Clyde » lancé avec Dj Moody Mike ?
Dj Anais B – Bonnie & Clyde, c’est un concept de duo de DJ que l’on a crée il y a un an avec Moody Mike.
On trouvait que c’était assez rare de voir des couples de DJ travailler ensemble et proposer des projets de commun. On trouvait ça sympa d’avoir un couple de DJ qui pourrait au cours d’une soirée créer des petits challenges musicaux entre les mecs et les nanas, tout cela dans une vybz chaleureuse.
On crée la musique ensemble et surtout on fusionne nos expériences personnelles, nos goûts. Moody Mike apporte le côté très technique, de mon côté, j’apporte mes ambiances, mes atmosphères musicales. Le mélange de nos deux univers est très intéressant.
Wendie – Est-ce que l’on peut s’attendre à d’autres projets pour cette année 2017 ?
DJ Anaïs B – Oui, j’ai pas mal de choses qui arrivent mais je préfère ne pas trop en parler pour le moment. Je suis plus dans l’action que dans les paroles. Mais il y a des projets de sortie de prévu. Il y a aussi des festivals qui sont en cours de booking.
Cette année, j’aimerais aussi développer le côté mode. J’ai envie de travailler sur des projets liés à la mode, mixer pour des marques, des défilés, des boutiques…
J’y travaille.
Wendie – Qu’est-ce qui te motive à aller au bout de ce rêve ?
Dj Anaïs B – Je pense que l’on est tous fait pour quelque chose dans la vie. Certains naissent et le savent déjà, d’autres le découvrent un peu plus tard. Je pense que j’ai découvert ma passion relativement tard mais que je suis faite pour ça.
C’est le parcours de la vie, les rencontres que tu fais, les obstacles que tu affrontes, chaque chose t’emmène vers une autre. Mon parcours est celui-ci. Ce qui me motive, c’est que je suis passionnée tout simplement.
Wendie – Quels sont les modèles de femmes qui t’ont influencé ou qui t’inspire ?
Dj Anaïs B – Grace Jones. C’est une nana qui avait « des couilles » artistiquement parlant. Elle s’assume en tant que femme, elle assume sa féminité. J’ai eu la chance de la voir sur scène au festival Afropunk à New-York. Elle dégage un tel charisme. C’est une icône pour moi. Elle a été actrice, mannequin, chanteuse. Elle ne se met aucune barrière.
Des artistes comme Eartha Kitt, Erykah Badu, aussi m’inspirent beaucoup. J’aime les femmes de caractère. Erykah Badu m’inspire pour sa créativité, son style, ses messages.
J’aime bien les artistes multifonctions, qui ne se mettent pas de barrières. On n’est pas obligé d’être dans une seule case. L’art en tout cas offre cette liberté là.
Je respecte aussi une artiste comme Beyoncé, qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas, c’est une machine de guerre. On ne peut nier sa ténacité, son amour du travail et surtout respecter sa carrière impressionnante.
Wendie – En tant que femme, comment parviens-tu à trouver ton équilibre entre vie professionnelle, vie privée et vie spirituelle ?
Dj Anaïs B – Je pense que c’est important d’avoir une vie saine. Surtout lorsque l’on évolue dans le monde de la nuit. Les clichés sur la « night life » ont la peau dure mais chacun décide ce qu’il fait. Selon moi, il ne faut pas aller dans l’excès mais plutôt être dans la mesure et savoir ce que l’on veut. Pour moi, être DJ, c’est un projet sur le long terme donc je me donne les moyens de tenir le plus longtemps possible. Je ne fume pas, je ne prends pas de drogue, je fais du sport, je dors pour récupérer, je bois modérément.
Spirituellement parlant, je lis beaucoup sur le développement personnel notamment sur la positivité. Je fais un travail sur moi pour être le meilleur de moi même. J’essaye de m’améliorer chaque jour.
Wendie – Merci beaucoup Anaïs . Pour découvrir les playlists et production d’Anaïs B, je vous partage son soundcloud :).