Karine Gatibelza (MakeUp Artist) – “Aujourd’hui, les femmes ont un regard différent sur le maquillage”

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On continue notre série de portraits avec nos jeunes entrepreneuses guadeloupéennes. Aujourd’hui nous allons parler « make-up », maquillage, beauté mais surtout estime de soi.

Notre portrait du jour est une femme passionnée par son métier. Karina Gatibelza exerce depuis plus de 10 ans dans le secteur de la beauté en Guadeloupe.

Aujourd’hui à la tête d’un institut « Make Up Box », maquilleuse plateau de la chaîne Guadeloupe 1ère et ambassadrice de marques de maquillage, Karine Gatibelza a su au fil des années se faire un nom dans l’univers des cosmétiques antillais et caribéens. Rencontre avec une femme battante et persévérante, qui n’oublie jamais de partager un beau sourire.

W.Z : Bonjour Karine, je vous propose que l’on revienne sur vos débuts. Le secteur des cosmétiques a-t-il toujours été une évidence ?

Karine : Le maquillage ne faisait pas partie de mes options de carrière au début. Mes parents étant fonctionnaires, mon père à la Poste et ma mère professeur, ils m’ont naturellement poussé vers un métier de la fonction publique. Donc à la suite à l’obtention de mon bac S, j’ai passé le concours d’infirmière pour l’hôpital Villejuif et le concours de sage femme pour l’hôpital d’Amiens. Une fois arrivée sur Paris, je me suis vite rendue compte que le secteur médical ne me correspondait pas du tout.

Cependant, j’avais l’habitude de maquiller mes amies pour toutes sortes d’occasion : fêtes, carnaval … Mais je n’avais jamais envisagé en faire mon métier. Mon cerveau, ma raison avaient du mal à concevoir le métier de maquilleuse comme un « vrai travail ».

Lorsque je me suis orientée vers un BTS en communication, j’ai décidé de chercher une entreprise dans le domaine des cosmétiques. C’était une manière raisonnable pour moi de m’orienter vers ce qui me plaisait véritablement. Malheureusement, je n’ai pas trouvé d’entreprise pour effectuer ma formation en alternance.

J’ai donc commencé à « jobber » : SFR, Orange … dans le but de me faire de l’argent et de vivre tout simplement. Et le samedi, j’allais aider ma cousine Sandrine à son salon de coiffure.

A l’époque, mes meilleurs amis, Kevin O’brian (styliste) et Alexis Rosso (coiffeur pour l’oréal) ne cessaient de m’encourager à me lancer. Ils voyaient bien que c’est ce qui me plaisait.

WZ : Combien de temps t-a-t-il fallu pour prendre conscience qu’il s’agissait de votre domaine de prédilection ?

Karine : Je pense que ça s’est fait naturellement. C’est devenu une évidence. Je me suis rendue compte que j’étais obsédée par les cosmétiques et que ça me plaisait vraiment.

J’ai donc fait des économies, et j’ai fait une demande de bourse auprès de la région afin de postuler pour une école de maquillage. J’ai été accepté à l’école Christian Chauveau, l’une des plus vieilles écoles de maquillage de France. C’est notamment où ce sont formé la fondatrice de Make up Forever et Make up atelier par exemple. Pendant cette formation d’un an et demi, je me suis formée au maquillage cinéma et photo. Je me suis également spécialisée en effets spéciaux et coiffures studio (réalisation de perruques notamment…). Ce fut une excellente formation. Je suis d’ailleurs toujours en contact avec eux aujourd’hui.

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WZ : Comment ça se passe à la fin de votre formation ? Comment fait-on pour se créer sa place dans le milieu?

Karine : Pour moi, le métier de maquilleur, c’est 25% de chance, 25% de talents, 25% d’opportunités et 25% de caractères. On se fait beaucoup d’illusions lorsque l’on sort d’une école de maquillage. On pense que l’on va pouvoir directement commencer à travailler. Sauf que la concurrence est rude. Nous sommes nombreux sur le « marché ». Il faut donc réussir à se faire sa place, se créer son réseau. On travaille beaucoup gratuitement au début. Le temps de se faire connaître, de constituer son book. Mais avec beaucoup de motivation et de détermination, on finit par pouvoir en vivre. C’est comme dans tout je pense. Il faut y croire.

WZ : A la fin de votre école, vous décidez de rentrer en Guadeloupe. Pourquoi avoir fait ce choix ?

Karine : A la fin de Chauveau, mes plans étaient de travailler un ou deux ans sur Paris avant de m’envoler pour les Etats-Unis. La première année, je maquillais les week-ends, je participais à des séances photos gratuitement, à des courts métrages dans le but d’étoffer mon réseau et rencontrer du monde. J’ai eu la chance de travailler pour l’agence Elite et de faire Milan pendant 2 semaines. Je continuais aussi mes collaborations avec Kévin, Sandrine et Alexis. Puis ma mère a fait un AVC et j’ai dû rentrer en Guadeloupe pour m’occuper d’elle et de mon petit frère qui avait 12 ans à l’époque.

Une fois arrivée ici, j’ai continué dans les cosmétiques. Je travaillais de manière occasionnelle pour la chaîne RFO, je faisais quelques courts métrages, des séances photos. Puis, j’ai été contacté par une école de maquillage en Martinique pour enseigner. Je faisais donc l’aller-retour.

Puis lorsque les chaînes télévisées sont passées à la HD (haute définition), la chaîne Guadeloupe 1ère m’a contacté afin de m’occuper du maquillage de la chaine. Cela fait maintenant 10 ans que je travaille avec la chaîne.

Je me suis rendue compte que le fait d’être en Guadeloupe pouvait m’offrir les mêmes opportunités que si j’étais restée en métropole. J’ai par exemple été contactée pour des tournages en Belgique, à la Réunion, en Métropole. Si c’est vous que l’on veut, on saura vous faire venir. La distance ne devient plus un frein.

Puis j’ai mis un frein aux tournages afin de pouvoir ouvrir mon premier institut. Mes clientes régulières me demandaient un espace pour les accueillir afin d’être plus à l’aise. Deux ans après l’ouverture de mon premier l’institut, nous avons du déménagé pour un espace beaucoup plus grand : Make Up Box situé à Jarry. Et nous nous apprêtons à ouvrir notre deuxième institut en Février.

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WZ : Quel regard portez-vous sur l’évolution du maquillage dans nos sociétés ?

Karine : Quand je suis rentrée en Guadeloupe il y a 10 ans, il n’y avait pas beaucoup de femmes qui se maquillaient. C’était très élitiste. Aujourd’hui, il y a de plus en plus de femmes qui aiment se maquiller, prendre soin d’elles. Toutes les femmes aiment se sentir bien et belles. Cela peut même devenir une thérapie.

Par exemple, chaque année, je tiens à collaborer avec une association pour une “belle cause”. J’ai eu notamment l’occasion de travailler avec des femmes battues à qui je proposais des ateliers de maquillage. Le maquillage leurs redonnaient confiance en elle, elles se redécouvraient. Elles redécouvraient leur féminité, les traits de leur visage. Elles se sentaient plus fortes.

Le maquillage est souvent perçu comme superficiel mais il ne faut pas oublier qu’à l’époque et aujourd’hui encore nombreuses sont les tribus qui utilisent le maquillage pour des rituels de force.

WZ : D’où vient notre regard critique sur le maquillage ? Pourquoi le considère t-on comme superficiel de nos jours ?

Karine : A partir du moment où on en a fait un attribut féminin permettant d’exciter l’homme. A l’époque de la Renaissance par exemple, où les femmes de joies mettaient à outrance du rouge sur les joues, ou sur leurs lèvres. Ca a été caricaturé et le maquillage est tombé dans un travers. Mais je pense qu’aujourd’hui, les femmes ont un regard différent sur le maquillage. Elles peuvent s’affirmer en en mettant ou pas mais elles ont choix. Elles peuvent mettre un rouge à lèvre noir, bleu, orange et dire « C’est moi, c’est qui je suis ». L’important c’est de se sentir bien dans sa peau.

WZ : Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées ?

Karine : Trouver les financements nécessaires à l’ouverture de l’institut. Ca n’a pas été de tout repos. Toute la partie administrative aussi était difficile au début. Il faut savoir faire appel aux bonnes personnes, bien s’entourer, avoir une comptabilité parfaite. Mais ça s’apprend. Il ne faut pas hésiter à se former, ne serait-ce que pour avoir certaines bases.

WZ : Quelles sont les actualités pour Make up box ? pour Karine Gatibelza ?

Karine : Comme je te le disais au début, nous allons ouvrir un deuxième institut « Make Up Box » en Février. Cette année, je serai l’ambassadrice de la marque True Color, une marque de maquillage sur Paris.

Je vais aussi beaucoup me consacrer à la formation. C’est important de transmettre un maximum. Il y a des jeunes formidables qui ont envie d’apprendre. Il y a aussi beaucoup de femmes qui souhaitent tout simplement se reconvertir.

Je prévois d’ouvrir un centre de formation aux Abymes qui proposera des formations en maquillage: atelier de maquillage, pigmentation permanente et semi-permanente des sourcils, extension des cils mais aussi des « Master class » avec des artistes caribéennes ou américaines.

J’aime les échanges inter-caribéens donc j’essaierai de faire venir régulièrement des maquilleuses étrangères qui viendront enseigner leurs techniques. C’est important d’apprendre des autres.

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WZ : On sent votre amour pour la Caraïbe. Qu’est-ce que cela représente pour vous ?

Karine : Je suis amoureuse de la Caraïbes. Mon objectif, dans tous mes projets, est de pouvoir créer des ponts justement entre nos îles. J’avais 11 ans lors de mon premier voyage à Antigua où j’avais une correspondante. Puis j’ai fait, la Barbade, Trinidad. Je me sens avant tout caribéenne avant de me sentir française. Pourtant j’adore la France, mais quand je suis à Trinidad, je me sens chez moi. On vit les mêmes choses. Nous sommes tous les deux insulaires, c’est une autre manière de vivre.

Quand je raconte à une amie Mélissa qui est Trinidadienne, mes formations et que je lui parle de la mariée qui ne cessait de transpirer, elle sait de quoi je parle, elle me comprend. Celle qui est à Paris aura beaucoup plus de mal.

Et puis il y a cette chaleur humaine, on aime la fête, on aime les couleurs. Quand je montre certains de mes maquillages lorsque je viens à Paris, on va me dire « Non mais, ce n’est pas possible, c’est trop! ». Mais si je montre ce même maquillage à une maquilleuse de la Caraïbe, elle va trouver cela magnifique.

WZ : Quels sont les conseils que vous pourriez donner aux filles ou aux hommes, qui vont lire cet article et qui voudraient se lancer dans ce domaine ?

Karine : Ayez une motivation surnaturelle. Soyez une bonne personne. Je ne suis pas pour la politique du loup, du lion ou du fauve. Ce n’est pas mon état d’esprit. Parfois, il vaut mieux être le panda, être tranquille, être une force tranquille. Il est préférable d’être solide plutôt qu’agressif.

Et puis surtout ne désespérez pas. Certaines personnes sont autodidactes et très talentueuses. D’autres ont besoin d’essayer plusieurs fois avant d’atteindre un certain niveau. Dans tous les cas, il ne faut pas baisser les bras. Quand on a vraiment envie de faire quelque chose, on fini toujours par y arriver et atteindre ses objectifs.

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9 Commentaires

  1. Beau parcours, on voit que le courage et la ténacité des femmes de ta famille coulent dans tes veines, ma nièce.
    Bonne chance pour tes futurs projets.
    Tatie Maud et Tonton Riton.

  2. Merciii Karine pour ce Beau tempoignage , Tu As un parcours inspirant. Cela m’ajoute encore plus de force et de détermination pour continuer. Je serais vraiment ravie de te rencontrer car je suis également dans le même secteur de la beauté et du bien être et également profiter de tes prochaines formation
    .A très bientôt

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