Une ode à mon corps.

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“Moi, c’est mon corps qui pense. Il est plus intelligent que mon cerveau. Il ressent plus finement, plus complètement que mon cerveau. Toute ma peau a une âme.” Colette, La retraite sentimentale.

Cher corps,

Je sais que je n’ai pas toujours était très tendre avec toi et je m’en excuse, mais j’ai toujours pensé que je devais te modifier pour pouvoir t’apprécier.

J’ai toujours porter un regard critique sur toi et je t’ai souvent privé de nourriture dans l’espoir de te voir plus mince.

Je t’ai souvent malmené devant la glace, en te maudissant de ne pas ressembler à l’image parfaite que la société m’inculquait.

Je t’ai souvent caché par honte, refusant de me mettre en maillot de bain ou tout simplement en sous-vêtements devant quelqu’un.

J’ai si souvent eu envie de t’échanger contre un autre, plus grand, plus mince, moins noir, moins marqué.

A l’adolescence, tu as changé, tu as commencé ta mutation et je t’ai haï pour cela. Les regards des autres sur moi me mettait mal à l’aise. Les réflexions concernant certaines de tes parties, m’obligea à vouloir me cacher davantage. Je refusais de te mettre en valeur, de peur que tu n’éclipses ma personnalité. Je clamais haut et fort que je n’avais pas à me dévoiler mais au fond, j’avais honte de toi et j’enviais certaines de mes amies (leurs longues jambes, leurs ventres plats, leurs peaux parfaites).

Tu n’étais pas vraiment mon ami. Tous tes défauts me paraissaient énormes et je ne voyais aucune de tes qualités. Ta taille n’était pas marquée, tes cuisses se touchaient, ton ventre se pliaient lorsque je m’asseyais et je te détestais pour ça.

Au fils des années, les critères de modes évoluèrent et devinrent plus superficiels années après années. Je commençais à peine à me réconcilier avec toi que la société établissait déjà de nouveaux critères.

Fessiers bombées, grosses poitrines, ventre plat, longues jambes et métrise de cet art complexe que j’appelle maquillage.

J’ai 22 ans maintenant, je ne me considère pas encore comme une véritable adulte mais je peux dire que je reviens de loin concernant mes rapports avec toi.

J’ai grandi dans une société qui ne m’a pas appris à t’apprécier et à t’accepter tel que tu es. On m’a appris à toujours vouloirs te modifier pour rentrer dans le moule. On m’a appris à perdre 10 kg en 1 semaine dans le but de plaire et d’entrer dans un bikini. On m’a suggéré de t’épiler, de te maquiller et même de te bomber/ raffermir, en jurant que c’était le seul moyen pour me sentir belle et phase avec toi.

Mais personne ne m’a appris à t’écouter, à t’accepter toi et tes rondeurs, toi et vergetures, toi et tes poils. On ne m’a pas appris à t’aimer au naturel. Personne ne m’a appris que tu étais mon meilleur ami et non une chose que je dois dominer et modeler à ma façon.

Je suis réellement désolée pour tout ce que je t’ai fait subir et pour toutes les choses que je continue à faire.

Nos rapports sont meilleurs mais il m’arrive encore de te souhaiter autrement, plus ferme, plus galber et je m’en excuse.

Tu sais, j’ai compris que ce n’était pas toi qui devait changer mais bien l’image que j’ai de toi.

Je dois encore lutter avec ces voix qui me juge lorsque je suis devant mon miroir. Il m’arrive encore de sauter des repas dans l’espoirs de perdre du poids mais je me rends vite compte que je te fais plus de mal que de bien. Il m’arrive encore de te souhaiter différent lorsque je ne rentre pas dans un vêtement ou lorsque ces morceaux de tissus ne tombent pas convenablement sur ma silhouette.

J’ai encore un peu de mal pour te montrer, j’ai encore un peu de mal à t’accepter mais je te promets que tous les jours, j’essaye d’améliorer notre relation.

Tous les jours, je me dis que tu as été à mes côtés depuis ma naissance et tu seras le seul à l’être à ma mort.

Tu es le meilleur corps car tu es le seul que j’aurais au cours de ma vie.

Je te promets de t’aimer et de te chérir, jusqu’à ce que la mort nous sépare.

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